Moore: finalement, même Le Monde y voit clair!

Hier j’ai commenté un article du Monde concernant Moore, en voici un second:

Fahrenheit 9/11 est un réquisitoire dévastateur, efficace et parfois simpliste contre George Bush. En 112 minutes, Michael Moore dresse le portrait d’un président qui, après avoir volé son élection, en 2000, utilise les attentats du 11 Septembre pour envahir l’Irak et amputer les libertés civiles. Vendu aux compagnies pétrolières et aux intérêts financiers liant sa famille aux dirigeants saoudiens, il masque les objectifs économiques des guerres d’Irak et d’Afghanistan. Il se sert des alertes terroristes pour effrayer les Américains et les convaincre de chasser Saddam Hussein.

Réquisitoire dévastateur mais mensonger: GW Bush n’a pas volé l’élection, le USA Patriot Act se situe dans la lignée d’un tas d’autres textes liberticides US avec ou sans 11/9, il a été adopté à la majorité y compris par les Démocrates qui auraient pu s’élever contre, les intérêts financiers ce sont des actions dans des entreprises cela ne signifie pas qu’il soit « lié », quant aux objectifs économiques on se demande encore lesquels ils étaient vu que le prix du pétrole est au plus haut, que le fameux « pipeline » que l’on nous promettait en Afghanistan n’est pas construit, que la guerre a coûté 87$ milliard officiellement (et coûte certainement bien plus) etc…

Le film remporte actuellement aux Etats-Unis un succès commercial et politique inattendu. Il a attiré dans les salles de cinéma des millions de spectateurs, galvanisé les démocrates et provoqué des accès de rage dans le camp républicain. Pour autant, la thèse de Fahrenheit 9/11 est-elle construite sur des faits ? George Bush est-il le seul responsable des malheurs américains ? Michael Moore a été souvent accusé dans le passé ne pas trop se soucier de la véracité des faits, voire de les déformer pour servir son propos. Qu’en est-il dans Fahrenheit 9/11 ?

Enfin la bonne question: où sont les faits ? George Bush est-il le seul responsable des malheurs américains ? Ben Laden n’a rien à voir là-dedans, c’est sûr! Je parie que pour Le Monde la réponse est oui…

Des faits vérifiés : Michael Moore affirme que le clan Bush a profité financièrement de ses liens avec les familles princières saoudiennes. Le cinéaste se trouve ici sur un terrain solide. L’ambassadeur de Riyad à Washington, le prince Bandar, n’a pas gagné son surnom de « Bandar Bush » pour rien. L’ancien président George H. W. Bush était, jusqu’en 2003, un conseiller important du groupe Carlyle et servait d’intermédiaire avec les dirigeants saoudiens. Jusqu’en octobre 2001, Carlyle comptait parmi ses investisseurs la famille Ben Laden. Michael Moore consacre plusieurs minutes de son film aux relations entre le président et James Bath, un conseiller financier qui a eu pour clients les Ben Laden, a investi dans une société appartenant à George Bush, Arbusto Energy, et a servi avec le futur président dans la garde nationale au début des années 1970. Ces relations sont prouvées. Cela dit, la famille Ben Laden a officiellement renié Oussama depuis de nombreuses années.

Vous imaginez ça ? Ils avaient des actions dans la même boîte! Si c’est pas une preuve ça! Le prince Bandar est surnommé « Bandar Bush » ? « pas gagné pour rien » ? On aimerait des détails! (note: je n’avais jamais entendu ça…). N’est-ce pas normal pour un ambassadeur d’un pays aussi crucial dans la guerre contre le terrorisme d’être reçu par le président US ? GW Bush doit-il ignorer le régime séoudien ? Quant à James Bath, c’est encore du « untel a servi untel qui a aussi servi untel ». Quelle preuve! Quel lien!
Si Moore montrait Bush et Ben Laden main dans la main, mais il en est très loin: tout ce qu’il a ce sont des liens très indirects, quelques investissements communs entre la famille Ben Laden et la famille Bush…

Des affirmations confirmées : Fahrenheit 9/11 pointe le peu d’attention accordé par l’administration aux alertes de l’été 2001, notamment un rapport de la CIA en date du 6 août annonçant une attaque imminente d’Al-Qaida. Les documents intermédiaires publiés par la commission d’enquête indépendante sur le 11 Septembre ainsi que ses auditions publiques vont dans ce sens. Les conclusions publiées à la fin du mois seront sans doute sévères pour la Maison Blanche. Dans la même logique, Michael Moore affirme qu’au lieu de se soucier du terrorisme islamique, George Bush a passé 42 % de son temps, lors des huit premiers mois de sa présidence, en vacances. Le calcul n’est pas de lui, il a été fait par le très sérieux Washington Post. Enfin, Michael Moore montre les images d’un président incapable de réagir au matin du 11 septembre 2001. Un conseiller vient lui annoncer à l’oreille que l’Amérique est attaquée, il reste pendant sept minutes, pathétique, sur l’estrade d’une école primaire en Floride. Dans un premier temps, la Maison Blanche a expliqué qu’il n’était resté que quelques secondes dans la classe. Elle a ensuite changé de version et reconnu qu’il avait attendu plusieurs minutes avant de rejoindre son entourage « afin de montrer sa sérénité à l’Amérique ».

L’alerte du 6 août annonçant une attaque imminente ???? Bon, il faut encore ressortir cette note: disponible ici. Elle n’indique pas d’attaque imminente, et son contenu est pour le moins flou, vague, inconsistant pour tout dire.
Les documents intermédiaires publiés par la Commission 9/11 (outre le fait que cette commission soit éminement partisane et comprenne un membre à la fois juge et partie…) démentent que le régime de Saddam Hussein ait collaboré directement aux attentats du 11/9, mais pas les contacts multiples, répétés, constants entre l’Iraq de Saddam et Al Qaeda (voir The Connection pour plus d’infos).
Concernant les 42% de vacances: 42-29=13!. Très sérieux WaPo, autant que si votre boss vous affirmait que travaillant 200 jours par an vous avez 165 jours de vacances.
Evidemment, l’hébétude de GW Bush immédiatement après les attentats n’est pas à son honneur, mais bon: il est humain. Dans quel état étiez-vous le 11/9 ?

Une assertion douteuse : Michael Moore déclare que les Etats-Unis ont attaqué les talibans en Afghanistan pour s’assurer que la société texane Unocal puisse construire un pipeline de gaz naturel traversant le pays au bénéfice du vice-président Dick Cheney et de l’ancien président d’Enron, Kenneth Lay. Unocal a en fait abandonné le projet en 1998. Il n’existe pas non plus la moindre preuve que 6 % à 7 % de la richesse des Etats-Unis se trouverait aux mains d’intérêts saoudiens et que les entreprises saoudiennes ont apporté plus de 1,4 milliard de dollars aux Bush.

Heh. Newsweek confirme. Mais ça dérange pas Moore.

La façon dont est décrite l’évacuation des Etats-Unis des membres de la famille Ben Laden le 20 septembre 2001 est également contestable. Il n’y a pas de doutes sur le fait que des Saoudiens « importants », dont des membres de la famille royale, ont bénéficié au lendemain du 11 Septembre d’un traitement particulier. Ils ont été notamment « récupérés » dans tout le pays avec l’aide du FBI, la police fédérale. Mais leur vol de retour ne semble pas avoir eu lieu quand le trafic aérien était suspendu, comme l’affirme Michael Moore. « Il n’existe aucune preuve crédible qu’un tel vol ait décollé des Etats-Unis avant la réouverture de l’espace aérien », écrit la commission d’enquête sur le 11 Septembre. Richard Clarke, ancien responsable du contre-terrorisme des administrations Clinton et Bush, particulièrement critique contre l’actuel président dans son livre Against all Ennemies (contre tous les ennemis), a déclaré publiquement devant la commission d’enquête avoir pris, « seul, la responsabilité d’autoriser ces départs ». « Je ne pense pas qu’il s’agissait d’une erreur, et je le referais », a-t-il ajouté.

La liste des passagers était connu du FBI puisque c’est le FBI qui les a rassemblés… bref encore du pipeau intégral de Moore… dans un film présenté comme un « documentaire », ça fait un peu léger!

Des facilités. Quand Michael Moore interroge Craig Unger, auteur du livre House of Bush, House of Saud ( la maison des Bush, la maison des Saud), devant l’ambassade d’Arabie saoudite à Washington, un membre des services secrets américains vient lui demander ce qu’il fait. Le réalisateur s’étonne ensuite dans son commentaire que les services secrets ne protègent pas des Américains mais des gouvernements étrangers. Or la mission officielle des services secrets américains (Secret Service) est, entre autres, de veiller à la sécurité des diplomates étrangers.

Enfin, les images de l’Irak d’avant-guerre présentent ce pays comme un havre de paix et de tranquillité. On y voit des familles joyeuses, des consommateurs souriants et des enfants faisant voler des cerfs-volants. La réalité de l’Irak de Saddam était tout autre.

Bref ce film contient une sérieuse série d’approximations, de mensonges, de raccourcis, d’omissions, d’amalgames, de conclusions hâtives… Et c’est ça le film qui doit faire perdre les élections à George W Bush ? Ceci dit, moi qui accusait Le Monde de ne pas savoir vérifier quelques faits, voilà que je suis bluffé.Pourquoi continuer alors à soutenir le film de Moore ? Uniquement par anti-bushisme ?

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